• Père Coughlin : racines et trajectoire, doctrine sociale, liens politiques kennedyens, Allemagne NS et dures relations avec Pie XII



    Parcours d’un prêtre médiatique, entre populisme radiofonique, anticommunisme et crispations romaines

  • ⁂ Arène du quadrilatère

    Ô lecteur studieux,
    Voici le portrait hautement éloquent d’un homme que le souffle de l’Église anima, puis que le tumulte des nations engagea, et dont l’écho même, aujourd’hui assourdi, résonne encore sous les voûtes des anciennes paroisses : le Père Charles Edward Coughlin.

    Prêtre canadien d’origine irlandaise, patriote américain farouche, orateur chrétien au verbe foudroyant, il fut tour à tour apôtre radiophonique, pamphlétaire détonant, chantre du salarié en proie à la grande dépression, puis malgré lui figure de controverse, jusqu’à sa mise au silence par un Saint-Siège, probablement soucieux de tempérance, d’unité.

    Il s’agit ici de retracer ce destin à la fois édifiant et « problématique », à l’intersection de la doctrine sociale catholique et de la géopolitique des nationalismes européens, entre mystique ouvrière et rhétorique du complot. Le tout dans l’Amérique fébrile de l’entre-deux-guerres, alors que la famille Kennedy se cherche un trône, et que la chaire se mêle au microphone.

    Antenna I.O. Vox Frequencia

    Post-scriptum : Il sied de noter, à ce sujet, combien l’héritage catholique irlandais des Kennedy fut marqué par un rejet du sionisme israélien, ce qui ne manqua point d’entretenir des tensions évidentes avec les milieux juifs.

    ☒ Sémantique qui cogne

    POPULISME, subst. masc.
    « Attitude politique visant à défendre les intérêts du peuple contre les élites, par une rhétorique simple et directe. »

    CORPORATISME, subst. masc.
    « Doctrine d’organisation sociale basée sur les corps intermédiaires (métiers, professions, syndicats) en vue de réguler l’économie et la politique. »

    JUSTICE SOCIALE, loc. subst. fém.
    « Principe moral, politique et économique dérivant d’une idée de justice, visant à la répartition équitable des richesses, des devoirs et des protections dans une société. »
    (Chez saint Thomas, elle relève de la justice légale ordonnée au bien commun ; chez les modernes, elle devient souvent mot-valise pour politiques redistributives). Cf. Rerum Novarum (1891).

    NATION PROLÉTAIRE, loc. subst. fém.
    « Nation considérée comme exploitée, humiliée ou dominée dans l’ordre international, à l’image du prolétariat dans l’économie capitaliste. » (Usage doctrinal chez Mussolini, Sorel ou certains tiers-mondismes d’après-guerre).

    ANTIPROTESTANTISME, subst. masc.
    « Hostilité doctrinale ou militante envers le protestantisme, considéré comme une rupture hérétique avec la tradition catholique, une source de divisions religieuses et un ferment de sécularisation. »
    (Présent chez les ultramontains, les ligueurs, les contre-révolutionnaires ou les apologistes de la Chrétienté).

    ANTICAPITALISME, subst. masc.
    « Attitude doctrinale ou militante opposée au système capitaliste, accusé d’engendrer l’injustice sociale, l’aliénation et le règne de l’argent-roi. »
    (Présent chez les marxistes, les anarchistes, les distributistes ou certains catholiques sociaux).

    ANTICOMMUNISME, subst. masc.
    « Refus de la doctrine communiste, perçue comme une menace contre la propriété, la liberté, la tradition ou la hiérarchie naturelle. »
    (Mobilisé tant par les libéraux que par les nationalistes, les cléricaux ou les sociaux-chrétiens).

    Σ Florillège d’anciennes leçons létales !

    Voici une anthologie de citations étendues du Père Charles E. Coughlin, sinon d’auteurs ou d’instances parlant de lui — classées par thème ; nous proposons le lien source en anglais et affichons en français :

    Anticapitalisme & anticommunisme

    « J’ai consacré ma vie à combattre l’abominable pourriture du capitalisme moderne, car il dépouille l’ouvrier des biens de ce monde. Mais coup pour coup, je frapperai aussi le communisme, car lui nous prive du bonheur dans l’autre monde. »
    — Père Coughlin (1935), Micheal Kazin, The Populist Persuasion: An American History, New York: Basic Book, 1995, p. 109.

    Antiprotestantisme

    Il avertit ses fidèles contre le Christian Front, le qualifiant de mouvement « démon et de non-chrétien ».
    — Père Coughli, « Evil Acts Charge to Christian Front » (PDF). New York Times. 16 novembre 1939. Retrieved January 16, 2014.(contre la Fédération des Églises et Missions de Brooklyn (regroupant la quasi-totalité des paroisses protestantes du borough).

    Technologie radiophonique

    Le prêtre utilise le micro pour “faire de chaque salon une chapelle” selon sa formule.
    — Père Coughli, « The Golden Hour of the Little Flower » (WJR-Detroit), le 17 octobre 1926 (Série de sermons apologétiques)

    Justice sociale catholique

    « Il semble que l’administration soit déterminée à lire dans la Constitution la définition de la justice sociale qui est déjà exprimée dans son préambule. Nous y apprenons que l’objet de ce gouvernement est d’établir la justice, d’assurer la tranquillité domestique, de promouvoir le bien-être général et d’assurer les bienfaits de la liberté pour nous-mêmes et pour notre postérité ».
    — Père Coughlin, Discours radiophonique du 11 novembre 1934, lançant la National Union for Social Justice ssa.gov

    « Notre gouvernement maintient toujours l’un des pires maux du capitalisme décadent, à savoir que la production doit être uniquement au profit des propriétaires et non des travailleurs. »
    — Père Coughlin, Entretien cité par The Washington Post, 17 janvier 1934 en.wikiquote.org

    Liens politiques « kennedyens »

    Dans un article paru le 16 août 1936 dans le Boston Post, Coughlin qualifie Kennedy d’« étoile brillante parmi les faibles “chevaliers” de l’administration Roosevelt ». en.wikipedia.org

    « Au début de l’année 1936, à la demande de Kennedy, l’évêque Francis Spellman et le cardinal Eugenio Pacelli (le futur pape Pie XII) ont tenté d’atténuer le vitriol de Coughlin. » en.wikipedia.org

    Allemagne hitlérienne & Italie mussolinienne

    « Je commence à comprendre pourquoi les publications juives d’Amérique m’ont qualifié de « nazi » ou de « fasciste », car pratiquement tous les [16] principes de la justice sociale sont mis en pratique en Italie et en Allemagne. »
    — Père Coughlin, Justice Sociale, 13 février 1939 en.wikiquote.org

    « La persécution des Juifs n’a suivi que la persécution des Chrétiens ».
    — Père Coughlin, Émission du 20 novembre 1938, au lendemain de la Nuit de cristal en.wikipedia.org

    Question judaïque

    « Le monde entier doit-il entrer en guerre pour 600 000 Juifs d’Allemagne qui ne sont ni citoyens américains, ni français, ni anglais, mais citoyens allemands ?
    — Père Coughlin, Detroit News, 30 janvier 1939 en.wikiquote.org

    « Si les Juifs persistent à soutenir directement ou indirectement le communisme, ce sera regrettable. En n’utilisant pas la presse, la radio et les banques, où ils occupent une place si importante, pour combattre le communisme aussi vigoureusement que le national-socialisme, les Juifs s’exposent à l’accusation d’être des partisans du communisme. »
    — Père Coughlin, Detroit News, 28 novembre 1938 en.wikiquote.org

    Pape, Vatican, Pie XII

    « Au début de 1936, à la demande expresse de Kennedy, l’évêque Francis Spellman et le cardinal Eugenio Pacelli (futur pape Pie XII) ont tenté d’atténuer le vitriol de Coughlin »en.wikipedia.org

    « Le 14 décembre 1938, le cardinal George Mundelein déclara que Coughlin était :  » …not authorized to speak for the Catholic Church, nor does he represent the doctrine or feelings of the Church. « , ni ne représente la doctrine ou les sentiments de l’Église.  » en.wikipedia.org
    – Doherty, Thomas (21 janvier 2021). « The Deplatforming of Father Coughlin ». Slate. Archivé de l’original le 20 avril 2022. Consulté le 25 janvier 2021.

    « [Il] faut donc que les salaires soient tels que l’ouvrier, pour lui-même, pour la famille, conserve sa dignité d’homme … pour qu’aucune masse d’hommes ne soit réduite à la servitude par l’usure. »
    — Pie XI, Quadragesimo anno, 1931

    Il s’agit d’un alliage donc, de catholicisme social ardent, de populisme économique, de sympathies fascisantes et d’antijudaïsme virulent, finalement désavoué par Rome et certains de ses alliés politiques proches et parfois au sommet.

    Σ Plan par manche

    • 🕛 I. Origines et formation : une foi irlandaise au service de l’Amérique ouvrière
    • 🕜 II. Le « Shrine of the Little Flower » : de la paroisse à l’émetteur
    • 🕝 III. Doctrine sociale : entre rooseveltisme et distributisme
    • 🕞 IV. Amitiés politiques : Kennedy père, politique et divergences
    • 🕟 V. National-socialisme : prudence théologique, ambiguïtés pratiques
    • 🕠 VI. De la faveur romaine au silence imposé
    • 🕡 VII. Fin de ministère : effacement sans destitution
    • 🕢 VIII. Jugement doctrinal : orthodoxie, erreurs, condamnations
    • 🕣 IX. Phénomène de masse : technique, crise, voix catholique
    • 🕤 X. Héritage : entre pionnier, avertissement et archétype populiste
    Le verbe en feu du révérend Coughlin ✨ Miroir d'une Amérique catholique ✨

    En langue anglaise, vous pouvez retrouvez, concernant « Father Coughlin », d’autres productions anticommunistes et pro-fascistes américaines et internationales.

    🕐 I. Origines et formation : une foi irlandaise au service de l’Amérique ouvrière

    Né le 25 octobre 1891 à Hamilton, dans l’Ontario encore pétri de ruralité, Charles Edward Coughlin vit le jour au sein d’un foyer catholique irlandais, où la ferveur familiale se conjuguait à une austérité volontiers jacobite. Dès l’enfance, le jeune Charles s’imprégna de la messe tridentine et des litanies mariales, en même temps qu’il observait l’effort rude des petites gens dont il deviendrait, plus tard, le chantre enflammé.

    Il reçut sa formation au Collège Saint-Michael de Toronto (Canada), bastion du thomisme enseigné par la Congrégation de Saint-Basile. Ces années furent capitales : Coughlin y absorba l’armature doctrinale de l’Église romaine, y forgea une rigueur scolastique et un zèle pastoral à toute épreuve. Ordonné prêtre le 23 mai 1916, il choisit librement le diocèse de Detroit, séduit par le défi missionnaire que représentait cette cité industrielle, effervescente et protestante.

    Son orientation sociale ne tarda point à se faire jour : nourrie des encycliques Rerum novarum et Graves de communi re, elle prenait à rebours l’individualisme protestant, proposant au monde ouvrier une alternative sacramentelle, communautaire et juste.


    🏛 II. Le « Shrine of the Little Flower » : de la paroisse à l’émetteur

    À l’instar de bien des paroisses de mission, celle confiée au jeune prêtre en 1926, à Royal Oak dans le Michigan, paraissait modeste, sinon marginale. Elle avait pour nom : Sanctuaire de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus – une sainte toute en suavité pour une tâche rude entre calvinistes acerbes et ouvriers désabusés.

    Mais le P. Coughlin n’était point homme à végéter dans l’ombre : dès 1926, il lança un projet audacieux, alliant catéchèse et technologie. Ses sermons furent diffusés sur les ondes de WJR-Detroit. D’un timbre grave et d’une diction à faire trembler l’auguste chaire, il su capter l’attention d’un peuple en quête de sens, accablé par les fermetures d’usines et les banqueroutes en cascade.

    Bientôt, chaque dimanche, ce furent quinze millions d’auditeurs qui tendaient l’oreille à ses philippiques : jamais encore prêtre n’avait autant parlé, aussi haut, aussi fort, aux masses. Il fonda ce que d’aucuns appelleront plus tard « l’Église radiophonique des États-Unis ».


    ⚙ III. Doctrine sociale : entre rooseveltisme et distributisme

    Le tonus idéologique du P. Coughlin ne se limitait guère à la morale. Il professait une vision sociale ancrée dans les encycliques léonines, qu’il crut d’abord retrouver dans les promesses du New Deal. De 1932 à 1934, il fut d’abord un ardent thuriféraire de Roosevelt, qu’il voyait en champion de la justice distributive.

    Ses principes : un travail décent sanctifié par la liturgie du labeur ; une autorité de l’État respectueuse de la loi naturelle ; une réforme monétaire éradiquant l’usure moderne et l’asservissement bancaire. Ce triptyque structura son programme qu’il nomma « Social Justice », à la fois cri de ralliement et futur hebdomadaire.

    Mais l’idylle avec Roosevelt tourna court : le président, trop docile envers Wall Street, devint cible d’un Coughlin furieux. Ce dernier lança alors sa propre organisation : l’Union for Social Justice, où se mêlaient catholiques ouvriers, déçus du capitalisme et orphelins des populismes paysans. Il y fit valoir un corporatisme inspiré de Hilaire Belloc et de Chesterton, souhaitant un ordre économique fraternel, enraciné et organique.


    🤝 IV. Amitiés politiques : Kennedy père, politique et divergences

    À cette même époque, un autre catholique irlandais, Joseph P. Kennedy Sr (père de JFK), richissime ambassadeur à Londres et patriarche d’une dynastie en gestation, se rapprochait de Coughlin. Tous deux partageaient un anticommunisme fervent, une antipathie viscérale pour la finance spéculative, et une volonté farouche d’éviter une guerre où les États-Unis serviraient, disaient-ils, « les intérêts de la City ».

    Mais cette alliance demeura fragile. Le ton antisémite radical et public notamment pris par les éditoriaux de Social Justice, les références aux « banquiers internationaux » et autres Protocols of the Elders of Zion, inquiétèrent Kennedy. Il voyait là un risque majeur pour l’avenir politique de ses fils, dont John, déjà promis à une carrière fédérale.

    En pragmatique, Kennedy coupa court, sans esclandre et sans appel. L’étoile de Coughlin, dès lors, commença à pâlir, mais tout en gardant une audience encore fidèle dans l’Amérique catholique et provinciale.


    ⚔️ V. National-socialisme : prudence théologique, ambiguïtés pratiques

    Si le Révérend Coughlin ne fut pas allemand, il n’en demeure pas moins qu’il regarda, l’ascension hitlérienne avec une curiosité approbatrice. Dès 1933, il loua dans le Führer une énergie de réaction contre le bolchévisme, qu’il identifiait comme la plus grande menace pour l’ordre chrétien. À l’appui, il citait même certains passages de Mein Kampf, entre adhésion et stratégie.

    L’année 1935 marqua un tournant supplémentaire : les lois de Nuremberg, en excluant les juifs de la citoyenneté, soulevèrent un malaise toutefois chez le prêtre, lequel en appelait à — comme chez les marcionites — « ne pas confondre finance internationale et judaïsme biblique ». Il rejetta en outre la Kristallnacht de 1938, en tant que barbarie populaire, mais sans pour autant renier ses diatribes contre l’« influence juive » dans les banques et les médias.

    Coughlin soutint jusqu’en 1941 le mouvement « isolationniste » America First, en fustigeant « l’intrigue anglo-judaïque » et en dépeignant la guerre comme fruit d’un complot financier. Ce vocabulaire, s’il puisait dans un ressentiment ouvrier sincère, le plaçait dangereusement sous les radars tant religieux que politques, le rapprochant de certains pamphlétaires d’outre-Rhin.


    ⛓ VI. De la faveur romaine au silence imposé

    Le destin médiatique du P. Coughlin fut longtemps protégé par l’évêque de Detroit, Mgr Michael J. Gallagher. Celui-ci, admirateur des grandes voix catholiques, voyait en son prêtre un héraut de l’orthodoxie populaire. Tant que Gallagher vivait (jusqu’en 1937), Coughlin agit sans entrave.

    Mais la mort de l’évêque entraîna un revirement ecclésial. Son successeur, Mgr Edward Mooney – futur cardinal – fit montre d’une certaine hostilité. En contact régulier avec la Secrétairerie d’État du Vatican, où officiait le cardinal Pacelli (futur Pie XII), il mit le prédicateur sous surveillance.

    Le printemps 1942 fut décisif : Pie XII, soucieux de préserver l’unité nationale des catholiques américains dans un pays entré en guerre, exigea discrètement mais fermement la cessation des émissions. Le 19 mai 1942, Coughlin obtempéra. Il fut ordonné de cesser aussi la publication de Social Justice, ce que le département des postes acheva en octobre, invoquant l’Espionage Act. L’affaire fut close sans procès canonique.


    🕯 VII. Fin de ministère : effacement sans destitution

    Déchu de son estrade radiophonique, Coughlin fut relégué à sa paroisse de Royal Oak, où il continua, avec un zèle discret, à confesser, catéchiser, célébrer. Il prêcha jusqu’en 1966, avant de se retirer à Bloomfield Hills. Il n’abandonna jamais la soutane, ni ne manifesta de révolte contre l’institution. Fidèle à son style, il écrivit encore quelques homélies, fit dire des messes en latin, et vécut dans une certaine pénombre.

    Il mourut le 27 octobre 1979, à l’âge vénérable de 88 ans, sans « réhabilitation », mais sans destitution canonique non plus.


    🧐 VIII. Jugement doctrinal : orthodoxie, erreurs, condamnations

    Sur le plan doctrinal, rien ne permet d’accuser Coughlin d’hérésie : ses sacrements étaient valides — comme beaucoup, il n’a pas dû identifier rapidement le problème Vatican II… —, sa morale conforme à la tradition, sa liturgie fidèle. Sa dévotion mariale, son culte envers sainte Thérèse et son attachement au rosaire témoignaient d’un cœur sacerdotal authentique.

    Cela il essayait de le traduire dans son corpus social, puisant dans Quadragesimo anno. Ses positions économiques (sur la monnaie, la nationalisation, le salaire familial) étaient simplistes et radicales.

    Ses allusions antijuives, son utilisation des Protocoles des Sages de Sion, son admiration pour Hitler, contrevenaient à la molesse et au contexte américain.


    📡 IX. Phénomène de masse : technique, crise, voix catholique

    L’immense popularité du Père Coughlin ne peut se comprendre sans le concours d’un triple faisceau : le génie médiatique, la détresse sociale, et l’attente spirituelle.

    Sur le plan technique, la radio – média nouveau, brûlant, immédiat – franchissait les murs, les langues, les silences. Là où la chaire paroissiale peinait à joindre des dizaines d’âmes, le microphone cathodique/catholique du père Coughlin électrisait des millions. Son verbe de feu, à la fois mystique et pamphlétaire, galvanisait la grand-mère pieuse comme l’ouvrier désabusé.

    Socialement, la Grande Dépression cherchait des « prophètes », des boucs émissaires, et des repères. Dans un monde où le travail se raréfiait, où l’épargne s’effondrait, où les institutions semblaient complices du désastre, la voix sacerdotale du père Coughlin apparaissait comme le dernier bastion de justice divine.

    Enfin, sur le plan ecclésial, l’Église américaine, encore balbutiante, peinait parfois à se démarquer du libéralisme protestant. Elle manquait d’une voix propre, enracinée, courageuse. Coughlin incarna cette quête, cette geste… mais l’incarna peut-être trop selon certains, au point de la confisquer, de l’orienter, et finalement, même de la compromettre.


    🧾 X. Héritage : entre pionnier, avertissement et archétype populiste

    Demeure aujourd’hui l’image contrastée d’un géant au pied enchaîné. Le père Coughlin fut un pionnier, il faut le dire sans détour : il bâtit le premier média catholique de masse aux États-Unis, traduisit la doctrine sociale dans une langue populaire, porta la voix des petits face à l’arrogance des puissants — souvent matérialistes sinon talmudistes. Mais il rappela que tout prêtre, si doué fût-il, reste tenu au lien d’obéissance. Et que la justice sociale ne saurait jamais justifier toutes les outrances.

    Sur le plan politique enfin, il préfigura les populismes de droite du XXIᵉ siècle : antimondialistes, isolationnistes, suspicieux des élites, et habiles à mêler discours moral, nostalgie sociale et dénonciation virulente.

    N.B. L’Amérique post-2008, en redécouvrant ses sermons, y retrouva un air de déjà-vu.

    Father Coughlin at microphone

    Clerc et tribun politisé


    🛎 Sentence par KO

    Le Père Charles Coughlin fut, à bien des égards, l’« homme du siècle » catholique aux États-Unis : bâtisseur d’autel, orateur de nation, pamphlétaire de justice. Il parla vrai, parla fort, parla beaucoup. Il scruta les failles de son époque L’histoire en fait une figure à la fois auguste et tragique, miroir des espérances trahies et des voix perdues. Rome, selon l’action d’un l’évêque local, sut le faire taire sans le briser, le rappeler sans le condamner.

    Le Père Coughlin fut à la fois une colonne de feu et un brasier incontrôllé. Il proclama l’Évangile aux masses laborieuses, réinventa la chaire à l’heure des ondes, et osa incarner un catholicisme social dans l’arène américaine. Mais dès qu’il cessa de servir l’autel pour flatter l’écho des foules, il s’éloigna du juste combat. Rome, dans une sage fermeté, le rappela au silence, en gardant de lui le souvenir d’une voix forte…

    La Rédaction


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