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Publié le par Florian Rouanet
S’il est certes important et actuel, pour une nation d’avoir un État fort, ayant des projets dépassant et élevant tout le corps social, pour une défense plus unie et efficace, il est tout aussi important que la société demeure organique : tant qu’il est bon et juste de déléguer des responsabilité : si l’aristocratie et le peuple sont vertueux, alors donnons leur une plus grande place !
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Sommaire :
I. Définition linguistique et importance
II. Aristote et Cicéron : fondements de l’organisation sociale
III. Saint Thomas d’Aquin et l’ordre naturel
IV. Papes et doctrine sociale de l’Église
V. Auteurs traditionnels, renaissants et contemporains (théologiens, philosophes et politiques)I. Définition linguistique et importance
Le principe de subsidiarité est une règle fondamentale de l’organisation sociale et politique, selon laquelle : une autorité supérieure ne doit intervenir qu’en cas de défaillance des instances inférieures. Cette approche valorise l’autonomie des individus, des familles et des petites communautés, et a traversé les âges grâce à des penseurs de renom.
Le principe de subsidiarité : Définition étymologique et lexicographique
1. Origine latine :
Le mot « subsidiarité » provient du latin subsidium, qui signifie « secours, aide, soutien ». Ce terme dérive de subsidere, formé de sub- (sous) et sedere (s’asseoir), désignant à l’origine une réserve d’appui, notamment militaire.
Dans un contexte politique, il évoque l’idée d’un soutien apporté par une entité supérieure lorsque l’inférieure ne peut agir seule.2. Définition lexicographique (CNRTL) :
« Le principe selon lequel une autorité supérieure n’intervient que pour accomplir ce que l’autorité inférieure ne peut réaliser par elle-même, en lui laissant autant que possible la responsabilité de ses propres affaires. »
Ce principe établit donc une hiérarchie fonctionnelle :
• L’autorité supérieure (subsidium) joue un rôle de soutien et de complément.
• Les entités inférieures conservent leur autonomie, sauf en cas d’impuissance.3. Synthèse philosophique :
La subsidiarité repose sur deux piliers :• L’autonomie des entités inférieures, fondée sur leur capacité naturelle ou fonctionnelle à agir.
• Le rôle supplétif des autorités supérieures, limité à pallier les carences sans jamais usurper les responsabilités.Ainsi, ce principe conjugue respect de la liberté individuelle et quête du bien commun.
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II. Aristote et Cicéron : fondements de l’organisation sociale
Aristote, père de la philosophie politique, insiste sur le rôle des sous-structures dans le bon fonctionnement de la Cité. Dans sa Politique, il explique que la société est un tout composé de parties (principe de totalité repris du thomisme), chacune ayant une fonction propre :
« La famille est la communauté établie par nature pour pourvoir aux besoins quotidiens ; le village est la première communauté formée de plusieurs familles pour des besoins qui ne sont pas purement quotidiens. » (Politique, I, 2)
« La cité existe par nature, et l’homme est par nature un animal politique […]. Mais le tout est nécessairement antérieur à la partie. » (Politique, I, 2)
Cicéron (106-43 av. J.-C.)
Dans ses traités politiques comme De Republica, Cicéron insiste sur l’idée d’un ordre social où chaque niveau doit agir selon sa propre vocation, contribuant à l’harmonie globale.
• Citation clé : « La société est comme un orchestre où chaque instrument a son rôle spécifique. »
Cette hiérarchie organique impose que les entités supérieures respectent l’autonomie des inférieures, en vue du bien commun.
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III. Saint Thomas d’Aquin et l’ordre naturel
Saint Thomas d’Aquin intègre les enseignements d’Aristote dans une vision chrétienne de l’ordre social. Le Dieu Créateur a institué un ordre naturel où chaque être tient un rôle spécifique :
« Le bien commun est supérieur au bien particulier ; néanmoins, le gouvernement doit respecter la diversité des ordres inférieurs, car c’est dans cette diversité qu’apparaît la sagesse divine. » (De Regno, I, 15)
Il affirme que les gouvernants doivent soutenir les échelons inférieurs, non pas pour les remplacer, mais pour leur permettre de fonctionner :
« La loi humaine est faite pour diriger les actions humaines en vue de leur fin ultime, qui est le bien commun, mais elle doit laisser chacun exercer ses propres responsabilités selon sa capacité. » (Somme Théologique, Ia IIae, q. 96, a. 3)
IV. Papes et doctrine sociale de l’Église
1. Léon XIII : restaurer l’harmonie sociale
Léon XIII, dans Rerum Novarum (1891), insiste sur le rôle des communautés de base :
« Ce serait une grave injustice, et en même temps un grand malheur et un trouble pour le bon ordre social, de retirer à des individus ce qu’ils peuvent accomplir par leur propre initiative et leurs propres forces pour le confier à la collectivité. »
Il rappelle également l’importance de la famille comme cellule fondamentale de la société :
« La famille doit demeurer souveraine dans sa sphère propre, car elle précède l’État par nature et par droit. »
2. saint Pie X : décentralisation politique de l’Église
Dans Notre charge apostolique (1910), Pie X exprime l’importance de l’autonomie des échelons inférieurs :
« Il faut respecter les initiatives locales et individuelles, car elles sont souvent plus adaptées aux besoins réels qu’une intervention centralisée. »
Pie X souligne que cette règle s’applique autant à la société qu’à l’organisation de l’Église elle-même.
3. Pie XI : formulation explicite du principe
Dans Quadragesimo Anno (1931), Pie XI donne une définition formelle du principe de subsidiarité :
« C’est un principe de sagesse indiscutable que ce qu’un groupe plus petit et inférieur peut faire, il ne faut pas le lui enlever pour le confier à un groupe plus large et plus élevé ; car c’est priver ces groupes de leur dignité et de leur utilité sociale. »
Il rappelle également que l’État doit être un arbitre et non un acteur omniprésent :
« Que l’autorité publique aide, coordonne, mais ne domine pas, car l’abus de la centralisation mène à la ruine sociale. »
Doctrine sociale de l’Église – État, Bien, Cité – avec Rerum Novarum & Quadragesimo Anno
Le rôle des corporations ouvrières dans Rerum Novarum
Cycle de conférences sur l’encyclique anti-moderniste Pascendi de saint Pie X – Abbé BillecocqV. Auteurs traditionnels, renaissants et contemporains (théologiens, philosophes et politiques)
1. Juan de Mariana (1536-1624)
Juan de Mariana, théologien espagnol de l’École de Salamanque, développe dans De Rege et Regis Institutione (1599) une théorie politique prônant la limitation du pouvoir des autorités centrales et le respect des corps intermédiaires tels que les familles et les guildes. Il souligne que le roi doit gouverner en accord avec les lois et les coutumes établies, respectant ainsi les libertés et les prérogatives des différentes composantes de la société.
Voici quelques citations directes traduites :
- « Les rois sont donnés pour gouverner le peuple selon la loi, non pour la violer à leur guise. » (De Rege et Regis Institutione, livre I, chap. V)
- « Celui qui use de son autorité pour opprimer la liberté et les droits du peuple se rend indigne du nom de roi, car il devient un tyran. » (De Rege et Regis Institutione, livre II, chap. VII)
- « Les lois ont été instituées pour régner sur les caprices des hommes, afin que la justice prévale sur la force brute. Le roi lui-même est soumis à cette loi. » (De Rege et Regis Institutione, livre III, chap. IX)
2. Edmund Burke, dans son opposition au centralisme révolutionnaire, insiste sur le rôle des communautés locales :
« L’homme, dans son essence, est lié à ses familles, ses corporations, ses paroisses : c’est là qu’il apprend les vertus publiques. » (Reflections on the Revolution in France, 1790)
Il critique les dérives d’un pouvoir central qui ignore la richesse des corps intermédiaires.
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3. Alexis de Tocqueville : La démocratie et l’autonomie locale
Tocqueville, dans De la démocratie en Amérique, observe que l’autonomie des échelons inférieurs est essentielle à la liberté :
« Les institutions locales permettent aux citoyens d’agir pour eux-mêmes. Elles les habituent à la liberté et leur apprennent à en user. »
Il conclut que le succès des sociétés libres repose sur cette subsidiarité naturelle…
Alexis de Tocqueville et le despotisme démocratique
4. René de La Tour du Pin : le corporatisme chrétien
René de La Tour du Pin, défenseur du corporatisme chrétien, promeut la subsidiarité comme un remède à l’atomisation sociale :
« La société chrétienne est organique ; elle repose sur la collaboration naturelle des divers ordres, où chacun trouve son rôle en respectant les autres. » (Vers un ordre social chrétien, 1907)
Catholicisme social, définition et distinctions
5. Charles Maurras (1868-1952) Penseur du nationalisme intégral
Maurras, dans L’Avenir de l’Intelligence et d’autres ouvrages, défend la subsidiarité comme principe de décentralisation. Il rejette le centralisme jacobin au profit d’un ordre social basé sur les libertés locales et régionales.
• Citation clé : « L’autorité doit respecter les libertés enracinées dans la tradition, car c’est dans ces corps intermédiaires que réside la véritable vitalité d’une nation. »
La distinction maurrassiene entre patriotisme et nationalisme
Une règle intemporelle pour l’harmonie sociale
Le principe de subsidiarité, depuis Aristote jusqu’aux penseurs du national-socialisme, en passant par les encycliques papales, reflète une sagesse universelle : permettre aux échelons inférieurs de remplir leurs missions sans intervention injustifiée des autorités supérieures.
Il invite à construire une société équilibrée, fondée sur la justice, la solidarité et la responsabilité partagée.

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